Tous les secrets des vins sucrés !
Tout, tout, tout, vous saurez tout sur les vins doux ! Le vrai, le faux ; le doux, le liquoreux ; le moelleux, le demi-sec. Bon allez je m’arrête là. J’espère que vous aurez lu ces premières phrases en chantonnant l’air de Pierre Perret.
Pourquoi tous ces termes ? Y a-t-il vraiment des différences ? Et d’abord, est-ce naturel ? Et il parait que ça va bien avec le foie gras, c’est vrai ça ?
Beaucoup de questions sur ce type de vins que nous allons aborder ensemble.
Vins demi-sec, vins moelleux, vins liquoreux : quelles sont les différences ?
Si certains vins sont sucrés artificiellement (par ajout de sucre puis arrêt de la fermentation), la plupart le sont naturellement.
Comment ? La fermentation permet de convertir le sucre du raisin en alcool sous l’action des levures. Pour qu’elle ne transforme pas tout le sucre du raisin en alcool, ce dernier doit contenir beaucoup de sucres au départ. Le sucre restant dans un vin après la fermentation est souvent appelé sucre résiduel.
Les mentions « demi-sec », « moelleux », « liquoreux » dépendent de la quantité de sucres résiduels restante. Je ne vais pas donner de chiffres précis car cela dépend des pays et même des appellations, et là n’est pas l’essentiel.
La confidence de la blonde 👱♀️ : un vin demi-sec, le moins sucré, contient en général au maximum l’équivalent de 3 morceaux de sucre par litre ; quand le vin doux, le plus sucré, peut contenir l’équivalent de plus d’une trentaine de morceaux de sucre ! Par conséquent si vous n’êtes pas trop une bouche sucrée, restez sur des vins demi-sec.
Sachez aussi que les vins liquoreux se conservent très bien (merci le sucre !) et qu’avec le temps la sucrosité s’atténue et le vin se complexifie. Il devient alors beaucoup plus intéressant et agréable à boire. Si vous avez en tête qu’un vin liquoreux est toujours lourd, enlevez-vous ce préjugé.
Comment produire des vins naturellement sucrés ?
Avec de la pourriture noble.
La Pourriture noble, ou Botrytis Cinerea. Il s’agit d’un champignon microscopique qui attaque les baies de raisin, concentre les sucres. Il donne des arômes de fruits rôtis. Pour se développer, cette pourriture a besoin de conditions bien particulières : raisins mûrs, matinées humides et brumeuses et après-midi chauds et secs. On trouve ce type de climat dans le Bordelais (Sauternes par exemple, à proximité de la rivière Ciron, sans qui la magie de ce champignon ne s’opérerait pas), dans le Val de Loire (Coteaux du Layon, Bonnezeaux,…) ou encore en Alsace avec les « vendanges tardives » et les « sélections grains nobles ». A noter, même si tous les raisins sont vendangés tardivement pour faire ce type de vin, le terme « vendange tardives » est très réglementé (on le trouve essentiellement en Alsace, mais pas que, à Jurançon et à Gaillac aussi). Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué… !
Par passerillage.
Il s’agirait d’une méthode très ancienne venue du Proche-Orient, de dessèchement naturel des raisins à l’air. Il existe 2 types de passerillage. Le passerillage sur souche : dessèchement sur pieds des raisins par évaporation de l’eau qu’ils contiennent sous l’action du soleil et du vent (parfois jusqu’au mois de janvier!). On retrouve beaucoup ce passerillage dans le Sud-Ouest, particulièrement à Jurançon. Le passerillage peut aussi se faire hors souche, au bout d’un fil, sur un lit de paille ou sur grille, dans un lieu chaud et ventilé, afin de concentrer davantage en sucres. Les vins de paille du Jura ou du Rhône (Ermitage) utilisent cette technique. On la trouve aussi en Italie (appellation Amarone).
Avec le gel.
Dans de rares cas, c’est le gel qui va concentrer en sucres. Les raisins très mûrs gèlent sur pieds, ils sont vendangés gelés (au minimum sous des températures inférieures à -6°C!) très tôt le matin pour ne pas que ça dégèle puis ils sont pressés encore gelés. Les vendangeurs ont un sacré mérite ! C’est le cas de ce qu’on appelle le vin de glace.
Le réchauffement climatique ne favorise pas cette pratique, hormis au Canada où elle est encore répandue.
Vous l’aurez compris, ces trois techniques utilisent le principe de la concentration des sucres des raisins.
Il existe aussi des vins artificiellement sucrés…
Par ajout de sucre
Comme précisé plus haut on peut trouver des vins, essentiellement d’entrée de gamme, avec du sucre ajouté. Mais cela est rare puisque l’ajout de sucre (chaptalisation) n’est plus autorisé en Europe depuis 2015 sauf par dérogation des appellations si les conditions climatiques ne sont pas favorables. Comme pour tout, il y a parfois des abus dans les demandes… Par conséquent, méfiez-vous et renseignez-vous bien sur la méthode de fabrication quand vous achetez un moelleux ou liquoreux ! D’autant plus s’il est bon marché. Ainsi, je vous conseille d’acheter un vin sucré directement chez le producteur ou chez un caviste plutôt qu’en supermarché…
D’autres techniques pour produire des vins sucrés.
Le mutage
Interruption de la fermentation par ajout d’alcool. L’alcool ajouté est neutre, à 96% vol. Plus il est ajouté tard, moins le « vin muté » garde de sucres résiduels et plus il est sec. Le degré alcoolique de ces vins est plus fort (entre 15-20% vol). Le Porto est le vin muté le plus connu. En France, on parle de « vin doux naturel« . Le nom peut paraître trompeur (car cette technique est selon moi un peu moins naturelle qu’un vin liquoreux) mais le terme naturel fait référence au sucre naturellement (et exclusivement !) présent dans les raisins. En France, 95% de ces vins proviennent de la région du Languedoc-Roussillon : en rouge, les Banyuls, Maury, etc ; en blanc : les muscat de Rivesaltes, de Beaume de Venise, etc.
Ajout d’un agent sucré
C’est le cas des champagnes et de certains types de Xérès.
A quel moment du repas servir ces vins sucrés ?
Vin sucré et foie gras
Quand on vous parle de vins blancs sucrés, vous pensez certainement au fameux accord foie gras et sauternes (ou autres vins liquoreux). En théorie c’est vrai que la texture fondante et onctueuse du foie gras se marie très bien avec le côté moelleux du Sauternes.
Oui mais, car il y a un mets, le foie gras est en général consommé en tout début de repas. Le sucre du vin va alors complètement saturer vos papilles ; c’est bien pour ça qu’on ne commence pas par le dessert un repas ! Très compliqué du coup d’apprécier d’autres mets et vins derrière votre entrée…
Il est donc préférable d’associer votre foie gras avec un vin blanc sec, ou même avec un vin rouge aux tanins bien fondus.
Le must : vin sucré et fromage ou dessert
Les vins sucrés, selon leur teneurs en sucres résiduels et leur degré d’acidité, sont plutôt à privilégier sur des fromages puissants (les pâtes persillées, certains fromages à croûtes lavées comme le munster, etc) ou sur des desserts.
Les vins liquoreux, surtout s’ils ont beaucoup de sucres résiduels, se marieront avec des bleus « forts » ou des desserts légèrement acidulés (à la rhubarbe par exemple) ou avec un peu d’amertume. Vous pouvez aussi jouer les accords de similitude. Par exemple, associer un liquoreux qui a des notes de fruits secs avec un moelleux aux amandes (accompagné d’une compotée de fruits acidulés pour contrecarrer le sucré).
Les vins moelleux, moins sucrés, seront parfaits avec des bleus « doux » (ou une tomme de brebis et sa confiture de cerises noires par exemple).
Enfin votre moelleux sera parfait avec des tartes ou des gâteaux aux fruits.
Quant aux vins rouges sucrés, ils s’accordent très bien avec des gâteaux et entremets au chocolat. Vous trouverez ici un très bel accord d’un Maury, vin doux naturel, avec une tarte au chocolat noir à la banane.
La température de service est aussi un point important. Il ne faut pas servir le vin trop chaud car la chaleur augmente la sensation sucrée et diminue la sensation acide. Il est préférable de servir le vin à 8°C sachant qu’il se réchauffe assez vite, pour le boire aux alentours de 10°C. Sachez qu’un grand liquoreux supporte facilement les 12°C.
Pour résumer sur les vins sucrés…
Type de vin sucré | quantité de sucre par litre de vin | Exemples d’AOP (non exhaustives bien sûr) | Exemples de mets pour accompagner |
Demi-sec | + | Vouvray (Val de Loire), Cour Cheverny (Val de Loire), Pinot Gris (Alsace) |
Cuisine thaï épicée Fromage à croûte lavée (Munster, époisses,etc) |
Moelleux | ++ | Jurançon (Sud-Ouest), Coteaux du Layon (Val de Loire), Gewurztraminer vendanges tardives (Alsace) |
Fourme de Montbrison ou d’Ambert Tarte aux mirabelles |
Doux (ou liquoreux) |
+++ > ++++ |
Sauternes (Bordelais), Monbazillac (Sud Ouest), Gewurztraminer sélection grains nobles (Alsace) |
Bleu d’Auvergne ou Gorgonzola > Roquefort Moelleux aux amandes ou carpaccio d’ananas |
Vin Doux Naturel |
++++ (degré alcool + élevé) |
Maury, Banyuls, Rasteau, Muscats | Mousse ou gâteau au chocolat (peu sucré et fort en cacao) |
J’espère que tout cela vous a donné le vin à la bouche. Vindiou les vins doux, qu’est-ce que c’est bon !
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