BOURGOGNE
Je me lance un défi en tentant de résumer le vignoble bourguignon ! Car il s’agit d’une des régions viticoles les plus complexes. On pourrait se dire “la Bourgogne c’est simple : 2 cépages principaux, du Chardonnay pour les blancs et du Pinot noir pour les rouges”.
Mais le cépage n’est pas le seul élément qui influence le goût du vin ! Il y a aussi le sol, le climat, etc. Bref, tout ce qui constitue le terroir.
La Bourgogne a créé son système d’appellations à partir des terroirs justement. Ceci avec une extrême précision. On parle en Bourgogne de “climats”. Avec “seulement” 27 000 ha de vignes, c’est la région viticole de France qui comporte le plus d’appellations ! 84 en tout. Elle produit 6% des vins de France, mais elle détient à elle seule 20% de ses AOC ! Parmi ces AOC figurent Vosne-Romanée avec ses vins prestigieux comme Romanée Conti, Echezeaux…Mais rassurez-vous, même si les prix sont globalement élevés en Bourgogne, on peut trouver de bons rapports qualité-prix !
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Un peu d’histoire
J’ai cherché à comprendre l’origine des fameux “climats”. Il faut remonter loin, au Moyen Age ! S’il y a un endroit où la religion est très liée à la production de vin, c’est bien en Bourgogne. Comme souvent les moines jouent un rôle important dans l’histoire viticole (et brassicole ;).
La confidence de la blonde 👱♀️: la cervoise (ancêtre de la bière) était servie aux personnes de passage quand le vin servait lui pour les messes.
Les moines ont initié une analyse très précise des vignobles qu’ils cultivaient et ont répertorié les sols, les cépages et les parcelles (telle que Clos de Bèze, aujourd’hui Grand Cru à Gevrey Chambertin, en 630). Ils ont vraiment été précurseurs ! Tout cela sans savoir l’origine de cette diversité : d’importants phénomènes géologiques issus de la tectonique des plaques.
AOC
Année de la fondation du Clos de Bèze
"Climats"
Autre question qui m’intriguait : les vins de Bourgogne ont-ils toujours été aussi réputés (et chers…=) ? Oui et non. Aux XIVè et XVè siècles, la Bourgogne est indépendante ; 4 ducs se succèdent. Ils s’enrichissent autour de l’industrie du textile et sont de véritables défenseurs de la qualité des vins de Bourgogne. On les retrouve sur les plus grandes tables (Rois de France, papes, etc). Ils sont alors 10 fois plus chers qu’ailleurs en France. Mais cela n’a pas toujours été le cas. Au XVIIè siècle, la Royauté et la noblesse construisent des résidences d’été en Loire. Ils se mettent alors à consommer les vins de Loire, beaucoup moins chers, et ces derniers gagnent en popularité (au détriment des vins de Bourgogne!).
Dernier point historique, le morcellement des domaines. Cela n’est pas récent ! Cette découpe a commencé pendant la révolution française, où les terres de l’Église ont été confisquées et redistribuées aux paysans. Par exemple, les 51 ha du Clos Vougeot appartiennent à 100 propriétaires. Puis le code Napoléon de 1804 va plus loin, en imposant le partage équitable des propriétés entre frères et sœurs. A l’inverse des Bordelais qui constitueront des sociétés qu’ils diviseront en parts (et non en terrains / parcelles).
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Généralités sur le vignoble de la Bourgogne
La Bourgogne s’étend sur 244 km du Nord au Sud, d’Auxerre à Mâcon, ce qui implique une diversité de climats d’une extrémité à l’autre. Au “nord”, dans le Chablisien et Grand Auxerrois, le climat est frais (influences atlantiques) alors qu’au “Sud”, dans le Mâconnais, le climat est plus chaud avec des influences méditerranéennes. Il peut se passer un mois entre une vendange au nord et une au sud.
Je l’écrivais plus haut, les deux cépages majoritaires en Bourgogne sont le Chardonnay pour les vins blancs (un cépage productif) et le Pinot Noir pour les vins rouges (un cépage capricieux car sensible à plusieurs maladies). Selon l’endroit où ils se trouvent en Bourgogne, ces deux cépages expriment une très large palette aromatique.
Pour les autres cépages, il me parait intéressant de citer le Gamay noir à jus blanc, celui que l’on retrouve dans le Beaujolais.
La confidence de la blonde 👱♀️ : le Gamay était très présent avant le XIVè siècle en Bourgogne, mais Philippe le Hardi, le 1er Duc, le banni de la Côte d’Or. Il le considère comme le cépage du peuple, facile à cultiver, avec de bons rendements. A l’inverse le Pinot Noir est le cépage de la noblesse.
En blanc, il y a l’Aligoté, celui utilisé dans le fameux kir (apéritif popularisé par le chanoine Kir au XXè siècle).
Au niveau des sols, on trouve des couches de calcaires et de marnes, aux compositions variées, de différentes époques et superposées. Sachant que “l’accord parfait” est Chardonnay et sols de marne ; Pinot Noir et sols calcaires (ou marnes très calcaires).
Enfin, un rapide point sur la “classification” des vins de Bourgogne. Outre les AOC Villages et Régionales, vous avez dû entendre parler des Grands Crus et des Premiers Crus. A la différence de Bordeaux, qui a classé des châteaux, la Bourgogne a classé des terroirs. Beaucoup plus pertinent à mon sens. Les Grands Crus représentent la crème de la crème (et seulement 2% de la production). Ce sont les parcelles qui ont un drainage idéal par rapport au degré de pente et à la granulométrie du sol et une exposition optimale. Juste en dessous, avec un drainage moins optimal, on trouve les Premiers Crus.
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Zoom sur les sous-régions du vignoble de la Bourgogne
La variété de température / météo et de sols / sous-sols implique de découper la Bourgogne en 5 zones.
Sous-région de Chablis, du Grand Auxerrois et du Châtillonnais
Beine, l’une des 20 communes du vignoble de Chablis (BIVB / Aurélien IBANEZ)
Dans cette zone, le climat est frais. On trouve donc principalement des vins blancs, à l’acidité élevée et avec une faible intensité aromatique. De nombreux vignobles sont exposés à la problématique du gel de printemps.
Les vins les plus connus de cette zone sont ceux de Chablis (vins blancs exclusivement, à base de Chardonnay). On y trouve des Grands Crus et des Premiers Crus, qui ont en commun leurs sols de marnes kimméridgiennes. Ces vins sont puissants et concentrés, et souvent avec beaucoup de tension. Même si les prix n’atteignent pas ceux des Grands Crus et Premiers Crus de la Côte de Beaune, on est rarement en dessous de 20-30€. Pour trouver des vins moins onéreux (moins précis aussi), il faut s’intéresser aux AOC Chablis et Petit-Chablis (les vignes sont elles sur des marnes portlandiennes).
Même si le vignoble Chablisien domine, il ne faut pas oublier les autres vignobles de l’Yonne à savoir le Grand Auxerrois, le Jovinien, le Tonnerrois, l’Auxerrois et le Vézelien où l’on peut trouver de belles pépites.
Pour silloner dans toute cette sous-région, je vous conseille la voiture. En revanche, si vous y passez un moment, sachez qu’il existe de nombreuses randonnées viticoles aux alentours de Chablis, notamment la balade “Les 7 Grands Crus” qui traverse une partie du vignoble chablisien.
Sous-région de la Côte de Nuits
Clos des Ormes, Morey-Saint-Denis Premier Cru
Roulez pendant 1h45 de Chablis jusqu’à Dijon et vous arrivez sur les premiers vignobles de la Côte de Nuits (Marsannay en l’occurrence).
C’est ici que vous trouverez les vins rouges les plus réputés de Bourgogne. On appelle d’ailleurs cette bande de vignoble “les Champs-Elysées de la Bourgogne”. Gevrey-Chambertin, Morey-Saint-Denis, Vougeot…j’imagine que ces noms vous parlent ! Si vous en avez dans votre cave, vous êtes chanceux ;). Sachez que c’est au sein de la Côte de Nuits que l’on trouve le vin le plus cher du monde : la Romanée-Conti Grand Cru !
Vous vous demandez peut-être pourquoi on parle surtout des rouges en Côte-de-Nuits. C’est dû aux sols majoritairement calcaires et de marnes calcaires qui rappelez-vous, répondent aux besoins spécifiques du Pinot Noir. Cela n’empêche pas de trouver quelques très bons blancs.
Pour parcourir la Côte de Nuits, n’hésitez pas à télécharger l’application « Balades en Bourgogne« . Si vous êtes juste de passage, en voiture, vous pouvez sélectionner « en voiture – sur la Route des Grands Crus de Bourgogne », et une voix vous donnera des explications sur chaque village traversé et sur les environs. Si vous êtes à vélo (le plus sympa :), parcourez la voie des vignes, le tracé est téléchargeable sur cette même appli.
Sous-région de la Côte de Beaune
Village sur la route des Grands Crus, à vélo
La côte de Beaune se situe entre la Côte de Nuits (au Nord) et la Côte Chalonnaise (au Sud). C’est le berceau des vins blancs les plus réputés de Bourgogne : Corton-Charlemagne, Montrachet, Bâtard-Montrachet, etc. Néanmoins, on y trouve aussi beaucoup de vins rouges, quasi 60% ; un peu moins réputés qu’en Côte de Nuits, certes. Parmi eux, vous connaissez sûrement Pommard (plus corsés) ou encore Volnay (plus tendres). Au Sud se trouvent deux appellations qui restent abordables en prix : Santenay et Maranges.
Une belle polyvalence donc, du fait de la variété de sous-sols et d’expositions.
Petit aparté sur la ville de Beaune, “capitale de la Bourgogne”. On y trouve de nombreuses maisons de négoce historiques, et c’est aussi là que se déroule chaque année la vente aux enchères des vins des Hospices de Beaune (au passage, ce lieu vaut vraiment le détour, en visite guidée idéalement).
L’idéal pour découvrir la côte de Beaune est le vélo, en suivant la voie des vignes, longue de 22 km, accessible à tous avec un faible dénivelé et un revêtement confort.
Sous-région de la Côte Chalonnaise et Couchois
Couche, village de l'appellation Côte du Couchois (BIVB / Michel JOLY)
Ici, pas de Grands Crus !
On trouve une belle variété de vins : rouge, blanc, rosé et pétillant. Avec une majorité de vins rouges en raison de la grande partie de sols calcaires et de marnes calcaires. Parmi eux, on trouve des vins fermes et charpentés, à Mercurey notamment, ainsi que des vins tendres et plus ronds, comme à Givry (car les sols sont plus sableux).
En blanc, il n’y a pas que du Chardonnay. L’appellation Bouzeron est réputée pour son Aligoté très parfumé.
Deux options pour découvrir la Côte Chalonnaise : en voiture, via la route 71, ou à vélo en empruntant la voie verte.
Sous-région du Mâconnais
La Roche de Solutré, lieu emblématique du Mâconnais
C’est la zone la plus étendue de la Bourgogne. On y trouve principalement du blanc, à base de Chardonnay, planté sur des sols calcaires, marnes et argile à silex. Ces vins blancs sont en général plus fruités et moins acides qu’ailleurs en Bourgogne, du fait de l’influence méditerranéenne.
L’appellation Pouilly-Fuissé, que vous connaissez certainement (à ne pas confondre avec Pouilly-Fumé, dans le Val de Loire), est le fleuron du Mâconnais, avec ses vins blancs complexes, fruités, floraux et minéraux. Les sols sont similaires à ceux de la Côte de Beaune. D’ailleurs, depuis peu, l’AOC Pouilly-Fuissé a désormais ses Premiers Crus ! Dépêchez-vous d’en acheter car les prix risquent d’augmenter…
L’appellation Viré-Clessé, la plus récente (1998), a initié la même démarche pour obtenir la classification de certains climats en Premiers Crus. A suivre… !
Au sud du Mâconnais on trouve un peu de vins rouges, à partir de Gamay et non de Pinot Noir ! Ceci s’explique par la présence de sols similaires à ceux du nord du Beaujolais (composés de granite et schiste).
Si vous êtes pressés, découvrez le Mâconnais en voiture. Sinon, vous pouvez explorer la voie verte de Bourgogne du Sud, sur 74 km, entre Chalon-sur-Saône et Charnay-les-Mâcon.
En résumé
Chablis, du Grand Auxerrois et du Châtillonnais : vins blancs principalement, à l’acidité élevée et aromatique peu intense.
Côte de Nuits : très réputée pour ses vins rouges : Gevrey-Chambertin, Morey-Saint-Denis, Vougeot, etc.
Côte de Beaune : très réputée pour ses vins blancs : Corton-Charlemagne, Montrachet, Bâtard-Montrachet, etc. Malgré cela, majorité de vins rouges : Pommard, Volnay pour les plus côtés ; Santenay et Maranges pour les bons rapports qualité-prix. A visiter absolument : Hospices de Beaune.
Côte Chalonnaise : vins rouges principalement, diversifiés (Mercurey : vins fermes et charpentés / Givry : vins tendres et ronds).
Mâconnais : vins blancs principalement, fruités et floraux, à l’acidité peu marquée. Des prix plus doux. Appellations à suivre : Pouilly-Fuissé et Viré-Clessé.
Pour terminer cette grosse introduction aux vins de Bourgogne, je souhaite préciser deux points pour la dégustation de ces vins. Tout d’abord, en raison d’une saison chaude et courte, l’effet millésime est important. Ainsi, lors de très belles années, il y aura moins d’écarts qualitatifs entre les différents climats de Bourgogne et il faudra souvent patienter un peu plus longtemps avant de boire les grands vins. A l’inverse, lors d’années compliquées, les différences ont tendance à augmenter. Enfin, si vous achetez des Grands Crus (et même certains Premiers Crus), soyez patients ! Un Grand Cru bu trop jeune équivaut parfois à un vin issu d’une parcelle moins qualitative (voire moins bon). La promesse des Grands Crus c’est le temps (exactement comme pour ceux d’Alsace) !
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